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Note concernant mes photos de l'année 2000.
De : gc@deltalink.org
Objet : Burkina Faso, nov. 2000 - (9)
Date : 22 novembre 2000 07:49:28 GMT+01:00
À : gc@deltalink.org
*** Ouahigouya, mardi 21.11.2000 - 18h + 22h30
Bonjour,
Voici la suite de mon carnet...
Il est lundi matin, un peu avant à 5h30, quand mon réveil sonne. Derniers
préparatifs de départ. J'ai confié une partie de mon barda aux Kaboré, mais
j'ai toujours ma valise, une mallette avec mon ordinateur et un carton avec
les cadeaux et objets informatiques encore à vendre.
Le taxi commandé est ponctuel. Il y a déjà deux autres passagers. Moi je
trouve sympa ses taxis à courses multiples: on va presque partout pour 250 F
CFA par personne, si c'est clairement une longue course (d'un bout de la
ville à l'autre), on double. En tant que blanc, il ne faut surtout pas
demander le prix, ce serait 1000 F ou plus... et il faut avoir la monnaie
car il est très difficile de négocier le retour sur un billet!
A la STMB, c'est l'agitation matinale habituelle: des dizaines de personnes
des horizons les plus divers se côtoient, avec souvent des montagnes de
bagages, des bébés, des "engins" (nom commun des mobylettes), etc. Certains
costumes sont superbes, surtout les touaregs.
Nous décollons à 7 heure pile, ponctuellement selon la règle de
l'entreprise. La sortie de Ouagadougou par Tampuy nous fait croiser un
incroyable flot de 2 roues. C'est par milliers, à 6 de front sur une avenue
finalement pas si large, que ces kamikazes s'avancent en un flux dense et
continu. Au milieu, quelques véhicules à 4 roues, dont certains très gros,
se frayent un passage en les frôlant de quelques centimètres. On est à 30 ou
40 km/h, mais l'effet "play station" est garanti...
Deux heures plus tard, à Gourcy, nous sommes arrêtés par l'étape
Ouahigouya-Yako du Tour du Faso 2000 (voir photo du peloton de tête).
A notre arrivée, vers 9h30, Abdoulaye m'attend et Sayouba (un enseignant qui
a un service à me demander) a envoyé un type avec un vélomoteur. Avec les
deux engins, on arrive à charger la valise, le carton, votre serviteur et sa
mallette en plus des deux pilotes. Encore une fois: il n'y a pas de
problème. Soulignons toutefois que je n'ai pas demandé expressément de venir
me chercher. La réservation au Colibri a été vite connue par mes amis... ça
c'est l'Afrique!
Matinée tranquille, avec la visite (impromptue?) de Claudine et de sa
nouvelle collègue, deux enseignantes de l'école Ypaala. On fait le point de
la situation avec Abdoulaye. Beaucoup de choses à se raconter, depuis ma
visite d'avril...
En fin d'après-midi, comme prévu par téléphone, j'ai la visite de Sayouba
Ouédraogo, le maintenancier informatique. En mai ou juin, j'avais envoyé
chez lui une équipe de la TVSR qui enquêtait sur Internet (et l'informatique) en Afrique. On part visiter son atelier...
*** Je vais me coucher, bonne nuit!
*** ---
*** Il est 3h du matin: petite insomnie dans le silence de la nuit africaine...
*** Il faut profiter avant le premier muezzin de 4h15!
Quelle surprise, chez Sayouba! J'arrive devant une petite boutique avec une
enseigne lumineuse "ATLANTIC RAYON MULTIPLE" (ATRAMU!?!) et la liste des
activités: informatique, maintenance, Internet, etc. A l'intérieur, un
aménagement très simple, avec 3 postes pour faire de la bureautique ou de la
formation dont un est connectable à Internet.
Dans la seconde pièce de cette petite maison, c'est l'atelier. Simple aussi,
et si on voit qu'on y travaille, les choses sont rangées et la propreté est
remarquable: il n'y a presque pas de poussière, alors même qu'il n'y a pas
de vitre aux fenêtres!
Ceux d'entre vous qui ont suivi mon séjour d'avril dernier à Ouahigouya
pourraient retrouver la même remarque concernant Sayouba qui m'avait déjà
impressionné. A l'époque il avait aménagé une partie de sa garçonnière en
mini centre informatique. Maintenant, il occupe professionnellement un autre
bâtiment de la même parcelle, il s'est marié entre-temps avec une de ses
élèves de bureautique et son ancien bureau est redevenu un salon
confortable...
Pour le moment, c'est le seul maintenancier que j'ai vraiment envie d'aider
à développer son affaire. Avant mon départ pour le Burkina, il m'avait
demandé une offre pour quelques pièces détachées, mais finalement y avait
renoncé, n'ayant pas les moyens de payer comptant. Ce gars ne m'a pas
demandé d'aide, mais seulement de travailler avec lui. Il est intéressé au
matériel de seconde main et parle de 10 machines par mois sur Ouahigouya. Il
est en relation avec plusieurs ONG qui lui font confiance, dont ECLA, et la
FNGN. Les locaux d'ATRAMU sont dans un quartier résidentiel (le secteur 10,
à quelques dizaines de mètres de l'hôtel Dounia) et non pas en ville, mais
les clients font le déplacement sans problème... et le prix des locaux reste
raisonnable.
*** Note ajoutée en mars 2009, à la publication de ces archives:
Sayouba Ouédraogo, dit Moyo, est décédé le 21 décembre 2002, à 32 ans. Fauché par un poids lourd à 20 km de Ouahigouya, alors qu'il rentrait à mobylette d'une intervention à Gourcy. Sa tombe est là, en contrebas de la route, sur les lieux-même de l'accident. Il a laissé une jeune veuve, enceinte de 7 mois, Lizeta, qui ne touchera une indemnité de l'assurance du camion qu'en 2008, près de 6 ans après le drame. Le chauffeur était pourtant fautif et a —semble-t-il— même été incarcéré. Entre-temps, il a bien fallu vivre et élever la petite Farida. Victime (consentante?) du «lévirat», elle a épousé le frère cadet de Sayouba. Il a aussi fallu se battre contre l'assurance du fautif, par avocat interposé, celui-ci prélevant 25% de la somme obtenue en fin de compte. Tout ça c'est aussi l'Afrique!
*** Rectification pour le muezzin: il vient de commencer, il est 3h45!
*** Et je vous explique pas le volume... à fond.
*** Ça me fait un peu penser à la caravane publicitaire du Tour de France.
De retour au Colibri, je découvre Sylvie M[...] qui boit un pot sous une
paillote avec un groupe. Juste pour situer les choses, il s'agit d'une
enseignante genevoise qui participait au stage pédagogique d'ESF en 1998 et
qui a pris la succession de ma femme pour organiser les stages suivants.
Cela fait plus d'une année qu'on ne s'était pas vu, nos chemins s'étant
passablement séparés et ça fait vraiment plaisir de se retrouver ainsi à
3000 km de chez nous! Elle n'est pas là pour ESF, mais avec un collègue,
dans le cadre d'une animation internationale d'incitation à la lecture: La
Bataille des Livres (?), financée par la Francophonie.
Je connais la plupart des gens de la tablée: Bibata, Azata, Soulémane,
Sayouba (l'enseignant)... Nous sommes rejoint ensuite par Issouf, puis par
Abdoulaye. On s'explique mutuellement nos activités, puis on mange un
morceau (car le Colibri fait à manger, c'est nouveau et ça manquait).
On n'a pas fait très tard, car les deux genevois prennent le car pour
Ouagadougou demain matin à 6h45 et s'envole ensuite pour Dakar, via Abidjan
(!), par Air Afrique. Bon voyage!
J'ai appelé Moussa Bologo en cours de soirée et le container serait parti de
Lomé ce lundi matin à 9h. Arrivée prévue à Ouagadougou: mercredi matin (?).
---
Bon, ben moi je vais me recoucher, à plus, ciao!
Gilbert Cujean
--
... en séjour au Burkina Faso [:-3)=
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De : gc@deltalink.org
Objet : Burkina Faso, nov. 2000 - (10)
Date : 22 novembre 2000 23:21:18 GMT+01:00
À : gc@deltalink.org
*** Ouahigouya, mercredi 22 novembre 2000 - 13h30...
Chers tous,
Hier, mardi, la journée a commencé par un peu d'exercice: du Colibri au "Six
S" à pied, avec ma mallette et un petit sac plastique, ça fait 20 minutes à
une demi-heure de marche dans la chaleur montante.
Sur la grande place de fête que je contourne, il y a une manifestation pour
l'ouverture du chantier de réfection de la route Ouahigouya-Séguénéga. Les
trax et les camions sont parqués au cordeau, une petite tente-cantine est
montée sur la place, un groupe de percussion jembé-balaphon se déchaîne en
plein soleil et il y a des militaires partout...
Aux "Six S" (ou Fédération Nationale des Groupements Naam/FNGN, ce qui n'est
pas pareil, mais presque), le président Bérnard Lédéa Ouédraogo est absent
(voyage en France), Aoua sa secrétaire pour laquelle j'apporte un modem
(cadeau d'une amie française) est absente à des obsèques, de même que
Clément Kayende le responsable administratif, bref, c'est la désolation...
Dans un bâtiment voisin, je retrouve Issouf de la cellule agro-alimentaire
qui me présente son supérieur qui lui a un petit problème d'informatique. Je
vante les qualités de Sayouba/ATRAMU qu'ils connaissent d'ailleurs déjà.
Je poursuit ma tournée au siège de ECLA. Il y a deux cents mètres, mais
Issouf insiste pour m'y amener sur la moto (125cm3) de son chef...
Chez ECLA, c'est les retrouvailles, avec les dames de confiance de Moussa
Bologo: Mmes Bagré et Ouédraogo (la première est en photo sur la page
d'accueil de notre site <www.deltalink.org> [ce n'est plus le cas actuellement/ndlr]).
Sur ma demande, Moussa a donné des ordres depuis Ouagadougou pour qu'on
mette un véhicule à ma disposition. Et pourquoi donc? Voici:
J'ai prévu d'aller cet après-midi au village de Mouni, celui dans lequel ma
femme et moi avons financé une bibliothèque scolaire (pour les habitués,
souvenez-vous de mes messages en janvier dernier, pour les autres, prenez
rendez-vous à mon retour, je vous expliquerai ;-)).
Le problème actuel de tout le Burkina et évidemment de Mouni est un déficit
pluviométrique catastrophique pour l'année en cour, ce qui veut dire que les
récoltes sont quasi inexistantes dans de grandes régions du pays,
principalement le nord où nous sommes. Il faut que les habitants achètent
des céréales dont les prix montent, pour le profit de certains spéculateurs. Les paysans, habitués à vivre avec peu d'argent se retrouvent sans assez de
nourriture et dans l'impossibilité d'en acheter en quantité suffisante.
J'ai donc décidé, symboliquement, d'acheminer 500 kg de Sorgho (mil) à
Mouni. Il me faut donc un véhicule.
Ce dernier, un pick-up Peugeot, est prêt, avec ou sans chauffeur, à choix.
Je coupe la poire en deux: pour la fin de la matinée, je conduirai seul,
pour aller au village, Issouf (un autre!) sera là, lui avec qui j'étais déjà
allé à Mouni en avril.
Je profite de la facilité de déplacement pour me mettre à la recherche de
Frank Musy. Ce producteur et journaliste de la Radio Suisse Romande est à
Ouahigouya, je le sais depuis mon arrivée au Burkina (!), et je le trouve
pas bien loin: à la Voix du Paysan, la radio de la FNGN, où il s'arrache les
cheveux sur un inventaire du matériel. On convient de se retrouver vers 19
heures pour l'apéro!
A 14 heures, Abdoulaye m'a rejoint, Issouf prend le volant et départ!
Première étape [photo ci-dessous à gauche], le marché où Abdoulaye a réservé les cinq sacs de
mil. Il faut refuser deux sacs, un pour qualité insuffisante (dixit les
Burkinabè), l'autre parce qu'il est percé et menace d'éclater durant le
voyage (là c'est moi qui veille au grain!). On prend de l'essence, 3000 F CFA, 6 litres et demi. Jamais trop, car les
chauffeurs siphonnent les réservoirs avant de rentrer les véhicules...
Il est 14h45 quand on prend la route en direction du Mali. Il n'y a pas de
goudron et le nuage de poussière que l'on dégage est impressionnant, surtout
à près de 80 km/h!
A une quinzaine de kilomètres, il y a Bango que je n'ai jamais vu
d'ailleurs, mais à l'entrée du village, on tourne à droite, et on s'enfonce
perpendiculairement à la route, dans la savane, sur une piste souvent plus
étroite que la voiture.
En arrivant à l'école de Mouni, sur la "colline" (3 m plus haut que le
village, à 300 m de celui-ci), les femmes, les enfants et les hommes sont là
qui m'attendent. Je les ai cités dans cet ordre car on remarque d'abord les
femmes qui forment une troupe colorée par leurs costumes magnifiques (et
parfaitement propre dans leur immense majorité), elles chantent et frappent
dans leur mains; les enfants sont très nombreux, assez sales et certains
n'ont pas l'air en parfaite santé (ont-ils faim?), mais ils se déplacent
beaucoup et écarquillent leurs yeux en me dévisageant sans mot dire; les
homes, eux, font particulièrement miséreux pour les vieux et se tiennent à
l'écart pour les jeunes...
Les femmes entonnent un chant de bienvenue, sur l'initiative de deux
vieilles qui dansent avec une élégance et une douceur incroyable en
balançant les bras [photo ci-dessus à droite]. Elles finissent à genoux devant moi. J'ai un
peu de peine, mais je fais face. C'est vraiment émouvant.
On fait une courte visite à la bibliothèque. Elle fonctionne et le directeur
de l'école me montre fièrement le cahier dans lequel il note les emprunts et
les retours. Au tableau noir, il y a la liste des groupes d'élèves et leur
rotation pour l'accès à la salle de lecture. Ce type est formidable!
Nous prenons quelques photos. Vous avez remarqué le pluriel? C'est que je ne
suis plus seul à fixer les événements: j'ai apporté un petit appareil à
Abdoulaye et il en fait bien usage! Le problème reste pour lui, le même que
pour moi: on est acteurs et photographes en même temps et c'est vraiment
difficile à assumer, d'autant que je ne sais pas photographier les gens
(voir les quelques rares photos que je vous joins)...
Et puis il y a eu les discours: Abdoulaye, puis le responsable administratif
du village, le chef coutumier par intérim (le chef est décédé en mars), la
représentante des femmes du village (qui a demandé au responsable
administratif de parler pour elle!). Toutes ces paroles sont traduite par
Abdoulaye car les gens s'expriment en mooré. Le message est de sympathie,
d'abord, et de condoléances pour le décés de la maman de Françoise [début octobre 2000/ndlr]. Des
prières sont parties de la mosquée vers Allah, pour la paix de son âme. On
m'a apporté symboliquement le résultat de la collecte faite pour cette
occasion, c'est une tradition ici: 725 F CFA sous la forme de 45 piécettes.
J'avais de la peine à retenir mes larmes... Je distribuerai cela au
mendiants de Ouahigouya.
Il y a eu ensuite des remerciements pour ce que
nous avons fait pour eux, et des souhaits que nous poursuivions cette aide,
peut-être par une sorte de jumelage Eclépens-Mouni? Merci aussi aux
autorités d'Eclépens qui ont envoyé 3 exemplaires dédicacés du livre sur
l'histoire du village.
J'ai parlé, aussi, en expliquant notre joie à savoir cette bibliothèque
opérationnelle, en remerciant chacun de rendre possible cette action, en
félicitant les initiateurs du projet et les acteurs (directeur, enseignants,
parents d'élèves, autorités coutumières) de permettre un tel investissement
sur les jeunes qui sont l'avenir du village, leur avenir. J'ai aussi
expliqué que les 5 sacs de mil étaient là à l'école, pour dispenser les
parents d'élèves de fournir leur part à la cantine scolaire. (Cette manière
indirecte de placer ce mil sous la surveillance du directeur, évitera toute
velléité d'utilisation ou de revente dans un autre but. Cela encourage aussi
un peu la scolarisation, dans la mesure où c'est les parents d'élèves qui
profitent du don et proportionnellement au nombre d'enfants). Tout ça était
un peu plat, mais ici on aime le ronflant et de toute manière avec l'émotion
et sans préparation, j'aurais eu de la peine à faire mieux.
*** Ouahigouya, mercredi 22 novembre 2000 - 22h, je continue mon récit:
Et il y a eu les cadeaux! C'est pas croyable ce que ces gens pauvres peuvent
être généreux! Ils mont apportés 2 poules et 1 coq, de la part de l'immam,
du responsable administratif et du chef coutumier par intérim. Ensuite, ce
fut les présents des femmes pour Françoise (leur coépouse!):
- une grande corbeille tressée, faite au village [photo ci-dessous mà gauche, sur la tête de la
femme au fond], et pleine d'une bonne quinzaine de kilos d'arachides (!);
- une calebasse et une louche;
- deux pans de tissages bleu foncé avec des chevrons blancs, absolument
superbes, un comme jupe, l'autre comme foulard (ou voile islamique).
La cheffe des femmes se pare des tissus, pour me montrer comment faire. Ça
lui prend 15 secondes et elle est superbe. On prend des photos, mais
malheureusement avec l'appareil chimique, pas le numérique; il faudra donc
passer à Eclépens à mon retour pour voir la photo... et Françoise en tissage
de Mouni!. Il y a une foule de monde et c'est très difficile de
photographier. Les images sont avant tout dans ma tête et je ne
suis pas "japonais" dans l'âme...
Je distribue des dizaines de poignées d'arachides aux enfants, mais il y en
a une telle quantité que le niveau de la corbeille ne diminue presque pas!
Finalement, on charge les cadeaux sur le pick-up et il est environ 16h30
quand on quitte le village. Toute cette manifestation n'aura duré qu'une
heure et quelque, mais quelle intensité!
En rentrant, le partage est vite fait: une poule pour Abdoulaye, les deux
autres à la cantine du coeur gérée par ECLA; les arachides seront grillées
en cacahouètes par la femme d'Abdoulaye qui en gardera une partie pour la
peine. Je file 1000 F CFA au chauffeur Issouf, on va boire une bière bien
méritée et je rentre au Colibri.
Un peu après, je me rends au Dounia, un hôtel assez bien, tenu par des
syriens qui en ont fait une sorte de pension de famille. Frank Musy a des
problèmes avec sont téléphone mobile et ses cartes Nanan à gratter. Pas de
problème! Je lui charge sont compte, mais constate que la batterie de son
appareil battant neuf ne se charge absolument pas?!? "Tant pis, c'est un
mobile fixe!", dit-il avec philosophie... et on passe au pastis!
Je reste finalement pour manger le très succulent souper de la "maman" du
Dounia, qui fait un peu penser à une propriétaire de tire-pipes, mais en
short et avec un coeur et un enthousiasme "gros comme ça"!
A notre table, il y a le "colonel", authentique officier français d'aviation
militaire à la retraite, qui s'occupe de l'ONG Jérémie et de ses projets
dans la région. Frank Musy est un fan de logiciels simulateurs de vols sur
PC. La conversation ne manque pas d'intérêt et les sujets sont variés...
Vers 22 heures, je rentre à pied au Colibri. Les rues des quartiers
périphériques ne sont évidemment pas éclairées et il faut faire gaffe aux
nids de poules. Le ciel est superbe et les étoiles sont inexplicablement
nettement plus lumineuses que chez nous, me semble-t-il.
---
Merci de m'avoir lu jusque là!
Et pour ceux qui n'habitent pas trop loin de Cossonay,
je rappelle le magnifique film TGV qui passe dimanche 26
et mercredi 29 novembre dans le cadre des Soirées Tropicales
d'Hiver organisées par mes amis Karim et Mireille Ganamé!
Pour plus de précisions: <www.deltalink.org> COUP DE PUB [n'est évidemment plus d'actualité!/ndlr].
Bye bye,
Gilbert Cujean
--
... en séjour au Burkina Faso [:-3)=
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Objet : Burkina Faso, nov. 2000 - (11)
Date : 24 novembre 2000 12:13:51 GMT+01:00
À : gc@deltalink.org
*** Ouahigouya, vendredi 24 novembre 2000 - 7h30
Bonjour l'Europe,
Comme vous le constatez, je suis toujours à Ouahigouya, ce qui veut donc
bien dire que le fameux container n'est toujours pas arrivé à Ouagadougou!
En fait, ce n'est plus vraiment mon problème, puisque j'ai été payé
intégralement, mais je tiens à voir l'état des colis et à faire constater
aux responsables d'ECLA/RECORD la qualité du matériel. Je veux aussi
absolument faire des photos pour la documentation de DeltaLink, la presse
suisse,... et vous!
En fait de photos, vous avez constatés que ce n'est pas l'abondance, mais il
m'est très difficile (disons même impossible!) de me planter sous le nez des
gens pour fixer leur image, si rien ne le justifie par ailleurs...
En plus de ça, depuis l'envoi du dernier message (no 10), mardi 22 à 23h30,
il ne m'a pas été possible de me connecter à Internet... et je suppose que
pour tout le Burkina c'est pareil! Dans tous les cas, la connexion se passe
bien jusqu'à l'échange du nom d'utilisateur et du mot de passe qui ne sont
pas acceptés par les serveurs de "fasonet". Cela s'est produit pour les 2 ou
3 connexions que je squate, pour Sayouba à ATRAMU, pour le Lycée Yadéga,
comme pour l'hôpital de Ouahigouya... je n'ai pas vérifié plus loin. Je me
méfie qu'une mauvaise manipulation ait endommagé le fichier des mots de
passe ou quelque chose comme ça... Espérons que ça s'arrange, car sinon...
vous ne le saurez même pas avant mon retour!
A part ça, tout va bien.
Mercredi matin, j'ai rendu visite à mon ami Daniel Savadogo, l'ingénieur
responsable technique du central téléphonique de l'Onatel. L'année 2000 est
assez dure pour lui: ce printemps il a perdu un "petit frère" du Sida, puis,
il y a quelques temps, la femme de ce dernier de la même maladie évidemment.
Ils laissent un certain nombre d'enfants qui, ajoutés à ceux engendrés par
la vie quelque peu dissolue du mari, font onze enfants de plus à charge de
Daniel! Je pense que le fait qu'il soit ingénieur n'est pas étranger à ces
découvertes tardives, mais ici, c'est comme ça, ça ne se discute pas. Et
dans l'esprit de Daniel, ça ne signifie pas seulement nourrir ces enfants à
distance (ils ne sont pas à Ouahigouya), mais aussi les habiller et les
scolariser.
Sur le plan professionnel, l'anecdote suivante décrit assez bien la
situation des administrations burkinabè:
Au mois d'août dernier, Daniel était toujours SEUL pour faire fonctionner
son central. Cette situation durait depuis plus d'une année, et j'en ai déjà
parlé en avril. Jo, l'ancien collègue subalterne de Daniel qui est
présentement responsable du central de Fada N'Gourma appelle au secours: le
central est en panne et une bonne partie de la zone est du pays est sans
téléphone. Il s'agit du même central qu'à Ouahigouya, de marque Digital,
moderne et informatisé. Daniel se rend donc à Fada (400 km!), passe 3 jours
et 3 nuits avec Jo pour finalement rétablir la situation. Entre-temps, il
"téléguidait" un novice pour faire fonctionner le central de Ouahigouya...
Ceux d'entre-vous qui ont vécu des mises en service ou des interventions du
genre peuvent s'imaginer! En agissant de la sorte, les deux ingénieurs ont
non seulement montré leur parfaite compétence et leur motivation au boulot,
mais ils ont fait économiser plusieurs millions de francs CFA à l'Onatel qui
sinon aurait dû demander de l'aide en Tunisie, voire aux USA? Et je vous
explique pas les délais! Eh bien l'Onatel ne leur a même pas envoyé une
lettre de remerciements ou de félicitations! On ne parle bien sûr pas non
plus de prime. Résultat: à la première occasion, les deux types se barrent
dans le privé et le pays aura fait un petit pas... en arrière!
Autre visite, au directeur local de la banque BICIA-B. Le chèque d'ECLA
figure bien sur mon compte. Je me renseigne sur les frais de transfert en
Suisse. Le plus rentable est certainement de passer par la France car hors
de la "zone franc" (CFA et français), ces frais augmentent très vite.
Mercredi après-midi, je travaille avec Sayouba qui m'amène d'abord faire la
connaissance de Max C[...], un Français, directeur d'hôpital parisien à la
retraite et distributeur des dons sur le Burkina de la fondation Cognacq-Jay
(?). J'ai échangés quelques mails avec lui par le passé, mais ne l'avait
jamais vu. Il s'occupe principalement de la pédiatrie, avec le Dr Zala qui
fait un travail exemplaire (mais que je ne connais pas encore, non plus). Sa
dimension financière fait de Max Cohen une sorte de seigneur au grand coeur,
mais une demi-heure à l'observer et à l'écouter me suffit. Je le reverrai
certainement car il a un Mac à réparer, mais je doute qu'on ait vraiment
d'autres choses à partager...
Dans l'atelier de Sayouba, on traite 2 ou 3 Mac qui sont arrivé là
entre-temps: les nouvelles vont vite! On boit une bière et la jeune Madame
Ouédraogo nous apporte un petit plat de viande crue, séchée au soleil, avec
des piments et autres épices... J'ai pensé très fort à mon amie Pia et à ses
conseils rigoureux d'hygiène alimentaire du voyageur tropical, et... je peux
lui dire que c'est excellent! ;-)
Hier, jeudi, petite journée de repos et sans histoire: correspondance,
multiples et vains essais de connexion, etc.
En fin de matinée, je reçoit la visite de Patrice Zerbo, enseignant au Lycée
Yadéga (enseignement secondaire, préparation au bac). On va visiter la salle
d'informatique fournie par l'intermédiaire de mes amis informaticiens belges
Jadot et Navez. Le matériel est toujours là et le clavier qui ne
fonctionnait pas en janvier n'a pas été remplacé ni réparé. Le lycée vit une
ambiance détestable: les membres du corps enseignant (et les élèves,
semble-t-il) sont scindés en deux clans qui ne se parlent même plus! Il y a
les grévistes durs, qui continuent à manifester leur mécontentement (en
grande partie légitime) de manière active, principalement en "grévant" tout
les vendredis (les "vendredis noirs"). Les autres, moins radicaux, sont
décidés à composer avec le pouvoir pour que l'enseignement ne soit pas
interrompu. Mettez par dessus tout ça un proviseur qui semble totalement
incapable et qui ne prend pas de décisions (on avait vu en janvier pour
Internet). Le résultat sur le plan de la salle d'informatique est qu'elle
est utilisée sans contrôle, uniquement par les maîtres, le plus souvent par
les grévistes (qui n'ont rien d'autre à faire?) pour jouer à divers jeux
installés sur les machines. Vu l'absence de dialogue entre les deux clans,
un enseignant qui aurait quelque chose à faire sur une machine occupée par
un collègue de l'autre bord ne peut même pas lui demander d'interrompre la
partie en cours! Navrant et inquiétant...
Après le dîner et une vraie petite sieste, j'ai fait un tour au marché,
acheté deux petits objets et des journaux, et distribué la majeure partie de
la quête de Mouni à des mendiants. Ma belle-mère aurait apprécié, j'ai pensé
à elle...
Ça fait aussi du bien de temps en temps de se balader seul et à pied.
---
Quand vous recevrez ce message, "fasonet" aura rétabli ses services.
Je vais essayer périodiquement...
Amitiés à tous,
Gilbert Cujean
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